Même si les voitures électriques ont enregistré une belle progression en octobre dernier (+2,9% / année précédente ; 24% de parts de marché ; une montée de l'électrique dans l'occasion), le marché européen est atone. Bousculée par une volonté écolo - politique rigide, cette industrie est sur la défensive, a perdu sa boussole stratégique. L'administration européenne a mis les roues du secteur sur un chemin où les nombreux compétiteurs chinois font la course en tête. Il faudra, au mieux, du temps pour rester dans la compétition des dix prochaines années, au pire, accepter de composer avec ces entrants qui finiront par "manger" les constructeurs européens. L'Europe politique aura gagné une sacrée bataille, nous roulerons dans des voitures chinoises ; perdu sottement cette guerre économique. La machine infernale est en route, il est déjà bien tard!
Si beaucoup d'acteurs sont persuadés que l'avenir de la mobilité est dans l'électrique, certains entrants sont sur le créneau, autrement porteur, du véhicule autonome. Waymo, Wayve et d'autres font déjà des prouesses, ont passé le stade expérimental et sont en train de descendre rapidement la courbe d'expérience (voir notre article de septembre dernier). L'arrivée des véhicules autonomes sans chauffeur va changer la donne. Nous entrons dans un nouveau modèle ; on ne vendra plus de véhicules mais des outils de mobilité aux multiples services. Une entreprise comme OPMobility ne s'est pas trompée. Elle s'installe aux Etats Unis pour vivre au coeur de cette (r)évolution. Cet équipementier avait d'abord miser sur l'hydrogène, a mis en pause sa recherche sur le sujet, pour s'orienter vers la voiture autonome. L'Europe décroche depuis cinq ans nous dit le patron de cette entreprise, les volumes d'avant Covid ne reviendront pas. La solution n'est pas dans le colmatage. Une nouvelle réflexion doit être menée, oubliant les schémas réducteurs et "tueurs" de l'administration européenne.
Les faits sont têtus en économie. Une stratégie ne peut pas prendre naissance à l'abri d'une décision politique ; le marché est toujours celui qui dirige la réflexion. Ce n'est plus suffisant pour les constructeurs européens de réduire les coûts de production. Il faut rendre les entreprises plus simples, plus rapides, plus fortes. Nous savons et constatons qu'une stratégie venant d'exigences écolo - politiques ne peut fonctionner. Certes, baisser les coûts fixes qui permet d'abaisser le seuil de rentabilité est un bon réflexe de gestion. Mais cette disposition est insuffisante en regard des énormes enjeux de cette industrie. Les consommateurs chinois ont soudainement étouffé leur engouement pour les voitures prémium européennes entraînant un recul rapide des volumes qui laisse encore à ce jour sans armes les constructeurs européens.
Nous pensons que la Watture promise aux plus gros succès est une étape. Que risque-t-il de se produire? La voiture autonome sera sûrement la prochaine grande étape de ce secteur.
Prenons deux exemples pour illustrer notre propos :
Mercedes était en avance sur ce créneau du véhicule autonome. Elle s'est fortement tournée vers l'électrique, a conçu de belles voitures qui ont du mal à trouver les clients encore fidèles à la marque. Résultat : 4000 employés vont quitter le groupe, la rentabilité s'est affaissée. Cette prestigieuse marque ne retrouvera pas ces volumes, il est urgent de rebâtir le segment dans lequel les clients de la marque s'identifient.
Porsche revient au thermique après avoir presque tout misé sur l'électrique, perdu beaucoup de clients et creusé une perte d'environ 1 milliard d'euros. Son usine de fabrication de batteries est en perdition et aura coûté plus de 400 millions d'euros. Elle voulait ainsi protéger son marché chinois qui est devenu un enfer eu égard à ses clients qui achètent désormais chinois.
On ne peut pas entrer tardivement sur un nouveau segment de marché avec des prix si prohibitifs qu'il faut pour vendre les véhicules réclamer des aides gouvernementales. Nos constructeurs, nos équipementiers doivent revoir leur stratégie. Les pouvoirs politiques vont sûrement reculer la date butoir de 2035 mais là n'est pas le sujet. Il faut penser mobilité, autonomie, volonté et pouvoir d'achat du client, prix dans le marché. Les deux prochaines années vont être essentielles pour sortir avec succès de la grisaille dans laquelle sont nos constructeurs européens, ne pas se mettre à seulement courir après les chinois.
Bien cordialement
Patrice DALAIGRE
MS CONSEIL
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